Un accès raisonnable à l’eau potable...


La raison des ’experts’ n’est pas nécessairement celle des peuples.

Il y a encore beaucoup à faire pour améliorer les conditions d’accès des plus démunis aux services de base, et en premier lieu à l’eau potable.

Pour être durable, le développement doit être équitable. Mais qui établit la notion d’équité ?

Un accès raisonnable à l’eau potable ?

Les ’Objectifs du Millénaire pour le Développement’ définissent un accès raisonnable à l’eau lorsqu’une famille se situe à moins de 1 km d’un point d’eau potable.

Pour les femmes, parfois très jeunes, qui doivent chaque jour, en plein soleil, parcourir 20km et porter au total 200kg d’eau sur leurs têtes pour approvisionner leur famille, où se trouve la raison d’un tel objectif ?

A l’échelle d’un petit village de 500 habitants (le seuil en-deçà duquel on estime en général qu’il n’est pas ’viable’ d’installer un système d’exhaure mécanique), l’énergie dépensée par ces femmes est bien supérieure à celle qui serait nécessaire pour faire fonctionner une pompe et distribuer l’eau à proximité de leurs maisons.

La plupart des projets d’hydraulique rurale annoncent comme résultat attendu, une réduction importante du temps que les femmes consacrent à la collecte de l’eau, temps qu’elles pourraient consacrer à des activités productives, à la génération de revenus qui leur permettraient de sortir de la pauvreté.

Mais leur a-t-on demandé leur avis, à elles ?

Lorsque j’en interrogeais quelques unes, autour d’une borne-fontaine dans le sud du Burkina Faso, elles m’ont répondu, en éclatant de rire, que maintenant elles pouvaient se reposer !

Le Sénégal va réaliser les Objectifs du Millénaire pour l’eau !

Politiques, bailleurs de fonds, experts, tous s’en félicitent. Ils auront relevé, en 2015, le défi de réduire de moitié le nombre de personnes qui n’ont pas accès à l’eau potable en milieu rural.

Voilà une belle performance. Le site officiel du Programme Eau et Assainissement pour le Millénaire (PEPAM) donne le détail de la situation de l’accès à l’eau pour chacune des communautés rurales du pays.

Attention... on dit bien ’accès à l’eau’.... Cela ne veut pas dire qu’elle soit potable !

Ainsi, pour la communauté rurale de Djilor (région de Fatick) on annonce que 53% de la population est desservie par réseau d’adduction d’eau. Mais, au niveau de 4 des 5 forages en service, on observe des concentrations en fluor supérieures à 3 mg/l qui, si la norme en vigueur était appliquée, exigeraient qu’ils soient fermés. Ainsi, le taux d’accès à l’eau potable dans cette communauté rurale est seulement de 4%, un des plus faibles du Sénégal !

Aucun investissement n’est programmé, aucune étude n’est menée, pour améliorer cette situation dramatique. Des solutions techniques existent, mais lorsque des acteurs locaux s’organisent pour acquérir les capacités nécessaires pour les maîtriser, et demandent un appui pour les mettre en œuvre, ils ne reçoivent aucune réponse aux courriers qu’ils adressent...

Que fait-on du Droit à l’Eau Potable, que l’Assemblée Générale des Nations Unies a affirmé comme étant un droit essentiel à l’exercice de l’ensemble des Droits de l’Homme ?

Les principes de la Gestion Intégrée des Ressources en Eau

La participation des acteurs, et notamment des femmes et des groupes défavorisés, a été identifiée comme étant un des principes fondamentaux d’une gestion durable des ressources en eau.

On sait très bien développer de belles arguties sur le rôle des femmes et les approches participatives, qui servent de base à la mobilisation de financements énormes pour accompagner la mise en œuvre des programmes d’hydraulique rurale.

Mais qui a quelque fois entendu la parole de ces femmes ou des représentants de ces populations dont la santé est en danger ?

Lorsque cette parole dérange, on oublie très vite les principes auxquels on a pourtant, officiellement, affirmé adhérer.


publié par   Bruno Legendre
le dimanche 29 juillet 2012
 
 

A lire...

Brèves

31 octobre 2014 - Nouvelles du Jatropha au Sénégal

Selon un rapport publié récemment par le réseau Jatroref, NEO et SOCOCIM ont renoncé à leurs (...)

25 janvier 2014 - De nouvelles questions sur Senethanol...

Deux articles intéressants ont été récemment publiés sur le site de ww.farmlandgrab.org au sujet du (...)

23 janvier 2014 - Veut-on vraiment développer les énergies renouvelables au Sénégal ?

Le gouvernement sénégalais a annoncé son intention d’encourager l’investissement privé dans les (...)